28 octobre 2004

Franck et Claude
Se marient en créole


À Saint Laurent du Maroni
Aujourd'hui, journée internationale du créole.
 

papillon

Papillon de Guadeloupe. Photo F.P.

 
La mairie de Saint Laurent du Maroni (Ouest Guyanais) prononcera

en créole

le mariage de Franck (enseignant - directeur du festival international de contes en
Guyane – membre de Gens de la Caraïbe)
et
Claude (enseignante)

à 9h30, ce 28 octobre 2004, journée internationale du créole.


 

LYANNAJ MOUCHÉ KÉ MADANM MARYÉ
(consentement des époux)

Mésyézédanm lasosyété, nou ké fè maryé:
(mesdames, messieurs, nous allons procéder au mariage de:)

Manzè Claude
(mademoiselle Claude)


(et)

Mouché Franck
(monsieur Franck)

Men dabò pou roun, fodré nou bay zòt, Manzè ké Mouché, déztrwa palò asou bi-lalwa Kòd Sivil-a pou zòt kanman.
(mais auparavant, nous devons de vous donner, mademoiselle, monsieur, lecture des articles du code civil qui vous concernent)

  • Bi-lalwa 212: Mouché-ké-Madanm-maryé lyannen kou zonng ké lachè, jou malò ké toujou gen panga, roun lanmen ké toujou lavé ròt.
    (article 212: les époux se doivent mutuellement fidélité, secours, assistance)
  • Bi-lalwa 213: Mouché-ké-Madanm-maryé, kantékant, ka trasé larèl lèspri ké larèl soumaké lafanmiy.
    (article 213: les époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille)
    Yé ka sabré léyon lavi pou yé timoun, yé ka mété yé dibout pou dèyè-dimen.
    (ils pourvoient à l'éducation des enfants et préparent leur avenir)
  • Bi-lalwa 214: Si zòt pa kasé-wéy divan lalwa, chak moun ké kontré-lanmen silon fòrs so lèstonmak.
    (article 214: si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage,ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives)
  • Bi-lalwa 215: Kou zong ké lachè Mouché-ké-Madanm-maryé ké rété ansanm a lakaz.
    (article 215: les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie)
  • Bi-lalwa 371-1: Larèl Papa-ké-Manman ka lovri chimen lavi pou timoun-an.
    (article 371-1: l'autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant)

Larèl Papa-ké-Manman ka rété jouk lò timoun-an vini gran divan-lalwa, pou protéjé li, pou panga li, pou swen li, pou so tèt drèt kou pikèt, pou lovri chimen lavi bay li, ké lovri so lèspri annan rèspé so kanman.
(elle appartient aux père et mère jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement dans le respect dû à sa personne)

Papa-ké-Manman ka mennen kannon timoun-an kantékant ké li, silon so larjò bòrdaj, padavwa dolo-a ka di : «gran kouté piti, piti kouté gran»
(les parents associent l'enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité)

Mouché-a ké Manzè-a pa kasé-wéy divan lalwa pou sa maryé-a.
(les futurs conjoints ont déclaré qu'il n'a pas été fait de contrat de mariage)

Manzè Claude
(mademoiselle Claude)

OU LÉ MARYÉ
(consentez-vous à prendre pour époux)

Mouché Franck ?
(monsieur Franck ?)

Mouché Franck
(monsieur Franck)

OU LÉ MARYÉ
(consentez-vous à prendre pour épouse)

Manzè Claude ?
(mademoiselle Claude)

Divan Lalwa, nou ka sonnen osonntanbou Claude ké Franck lyannen.
(au nom de la loi, nous déclarons Claude et Franck unis par le mariage)

Atò, fodré zòt konnèt bi-lalwa ka kòrdé zòt lyannaj.
(et maintenant, nous allons vous demander de prendre connaissance de l'acte qui consacre votre union)


 

Mayé an kréyol : LE CAS d'HAÏTI

Le mariage d'Aristide s'était tenu en créole. Plus qu'aucun autre potentat, Titid fait usage de la langue populaire.

La plupart des mariages en Haïti sont depuis nanni-nannan célébrés en créole. Cette réalité s'impose dans tous les milieux, en ville comme dans les campagnes. Que le célébrant soit pasteur ou prêtre, la langue créole est utilisée à toutes les étapes de la cérémonie.

Le célébrant salue les invités: «Mésyédam, bonswa.» Et, généralement, renchérit en ces termes : «Aswè-a nou réyini la pou n sélébre maryaj matmwazèl… ak mèsyé…» Arrive un moment où il dit: «Si pami nou la gen moun ki konn yon rézon valab ki ka anpéché maryaj la fèt, kè l deklaré sa kounyé a, sinon apré l ap two ta.»

Le sermon se fait en créole. Les versets sont souvent lus en français, à la campagne comme en ville. (La Bible de Louis Second est traduite en créole haïtien).

A la fin, on entend le célébrant dire en français (en ville surtout), ou en créole: «Que les mariés s'embrassent! Maryé yo kapab anbrasé kounyé a.» D'autres préfèrent dire: «Maryé yo kapab bo kounyé a.»

En Haïti, on se marie à l'église seulement, qui a compétence légale pour unir les couples (c'est aussi le cas dans les pays anglophones proches de nous), ou bien on ne fait qu'un mariage civil, sans lecture biblique ni commentaire religieux. A part cela, les mêmes choses se disent, en créole, en fonction des futurs époux, de leur rang social, en fonction aussi de l'officier d'état-civil. Car, chose qui peut surprendre, il y a en Ayiti des officiers d'état-civil qui ne parlent pas ahak de français.

Il n'y a pas encore des textes de loi écrits en créole entre les mains des officiers. Pour la circonstance, quelqu'un les interprète en créole. Une commission des langues à la secrétairerie d'état à l'alphabétisation planche sur la traduction en créole de l'ensemble des textes de loi, mais rien n'est encore public.

Mais, ce jour-là, à St Laurent du Maroni, c'était bien la toute première fois que les textes officiels du code civil étaient officiellement traduits et prononcés dans notre langue créole.

A moins que nos amis de l'île Maurice, La Réunion, les Seychelles ou ailleurs ne nous fassent la preuve du contraire… ce que nous ne manquerions pas de signaler à nos éclairés visiteurs.

  • d'après des informations recueillies par voie électronique auprès d'enseignants-écrivains haïtiens: Jean Armoce Dugé à Port-au-Prince, Emmanuel W. Védrine à Boston.

Jean-S. Sahaï, Nov. 2004.

 
 

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